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De moins en moins de propriétaires au Luxembourg ?

Pourquoi les prix restent stables au Luxembourg : tendances et chiffres clés du 1ᵉʳ trimestre 2025
28 juillet 2025 par
De moins en moins de propriétaires au Luxembourg ?
Laetitia K.
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Souvent qualifié de terre de propriétaires, le Luxembourg a longtemps figuré parmi les pays européens où la part de résidents détenteurs de leur logement était la plus élevée. Mais depuis quelques années, la tendance s’inverse. Entre évolutions sociétales et choix politiques, le Grand-Duché est-il en train de devenir, petit à petit, une terre de locataires ?


Des chiffres qui ne trompent pas

En 2022, 72,4 % des résidents étaient encore propriétaires de leur logement, selon Eurostat. Un taux resté stable depuis 2019. À titre de comparaison, la France comptait 63,4% de propriétaires et l’Allemagne à peine 46,5 %. Autrement dit, le Luxembourg faisait partie des pays d’Europe de l’Ouest où la propriété était la norme.

Mais 2023 marque un tournant : pour la première fois, la proportion de propriétaire est passée sous la barre des 70 %. D’après Eurostat, seuls 67,3 % des résidents détenaient leur propre logement, tandis que 32,4 % étaient locataires.

D’autres données viennent confirmer ce basculement. Entre 2019 et 2023, le Fonds du Logement, l’un des principaux promoteurs publics, a construit 301 logements destinés à la location abordable, contre seulement 66 logements destinés à la vente. En 2023, la SNHBM, autre promoteur public, a vendu 67 logements abordables, mais en a loué 121. Même si la tendance s’est inversée en 2024, probablement en raison de la baisse des plafonds des aides étatiques, 1.115 ménages se sont inscrits en 2024 pour une location abordable, contre 975 pour une vente abordable. C’est dire l’intérêt croissant des résidents pour la location.

 

Des mesures pro‑location ?

Si la crise immobilière post-Covid y est sûrement pour beaucoup, l’orientation politique explique aussi ce changement de braquet.

Depuis le 1er juillet et la fin des aides fiscales, l’accès à la propriété n’est clairement plus la priorité du gouvernement. Le ministère du Logement semble d’ailleurs avoir pris résolument parti pour la location abordable. Lors de ses récentes interventions, le ministre Claude Meisch en a même fait un thème récurrent.

Le 4 juillet, alors qu’il présentait les modifications du Pacte Logement 2.0, il a souligné l’intérêt croissant des communes pour la Gestion locative sociale (GLS) et la location abordable : +868 et +2.000 logements respectivement entre 2021 et 2024. Un attrait qui n’est pas seulement social, mais aussi financier, puisque l’État accorde depuis 2021 une dotation annuelle de 2.500 euros par logement placé en GLS ou en location abordable.

En juin, le ministre a également lancé un appel aux promoteurs privés, leur proposant, dans le cadre de projets pilotes, de louer des résidences entières à un prix inférieur au marché à des bailleurs sociaux tels que le Fonds du Logement. Ces derniers se chargeraient ensuite de les mettre à disposition de ménages à faibles revenus.

Enfin, en avril, il a présenté un projet de loi visant à optimiser le cadre du bail abordable, avec l’introduction d’une aide financière complémentaire pour encourager la gestion de logements dédiés aux salariés et aux étudiants.


Et si l’offre ne pouvait plus combler toutes les demandes ?

Qu’elle soit structurelle ou politique, la mutation est en marche : le Luxembourg est en passe de devenir une terre de location abordable. Mais ce virage ne risque-t-il pas de laisser certains ménages sur le bord de la route ?

Entre les familles aisées déjà propriétaires ou capables d’acheter, et les ménages à faibles revenus qui bénéficieront de logements subventionnés, que deviendront les classes moyennes et les nouveaux arrivants ?

Ces ménages gagnent souvent trop peu pour acheter mais trop pour accéder aux logements abordables tant plébiscités par l’État. Il leur reste donc la location classique. Et c’est bien là que le bât blesse.

Piliers de ce segment, les investisseurs privés ont déserté le marché ces dernières années. L’obligation de fournir 20 % d’apport personnel, la rigidité des banques, les prix immobiliers élevés et un marché du neuf encore fragile ont découragé beaucoup d’entre eux. Résultat : la location classique se raréfie, laissant une partie de la population sans réelle alternative satisfaisante.

Selon de nombreux experts, le marché immobilier y gagnerait si l’État soutenait davantage l’investissement locatif. Dans un récent numéro de Paperjam, plusieurs acteurs du secteur ont plaidé en ce sens.

« Ce sont les investisseurs qui ont toujours soutenu la location », rappellent les cadres de BPI Real Estate, qui proposent de ne plus limiter leurs déductions fiscales. Louis‑Marie Piron, fondateur de Thomas & Piron, suggère quant à lui d’introduire des crédits d’impôt pour relancer l’investissement. Le président de LuxReal, Romain Muller, plaide de son côté pour ramener le taux de TVA à 3 % pour les investisseurs.

Autant de propositions que le gouvernement devra peut-être envisager s’il souhaite éviter de creuser le fossé entre locataires et propriétaires.

De moins en moins de propriétaires au Luxembourg ?
Laetitia K. 28 juillet 2025
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